Alors que nous entrons dans la seconde partie du mois de juillet avec la torpeur estivale qui l’accompagne, synonyme d’une actualité politique au ralenti; le ministre de l’éducation nationale, M. Benoit Hamon, a annoncé que « la question n’est plus de savoir s’il faut apprendre l’informatique et son langage, mais de savoir comment, pour quels usages, et à quelle étape du cursus le faire ». Il ajoute qu’il encouragera « en primaire une initiation au code informatique, de manière facultative et sur le temps périscolaire ».
Je ne vais pas ici commenter la justesse de cette décision, mais plutôt réagir après avoir lu plusieurs commentaires sur des sites d’information montrant une méconnaissance du sujet et un mauvais penchant à aller vers des constats trop simplistes.
Une critique peu réfléchie
Les critiques sont de trois ordres. Tout d’abord, cet enseignement est perçu comme non-prioritaire. Le plus souvent, on avance l’importance de savoir lire, écrire et compter avant de s’intéresser à ce sujet. Attaché moi-même à la lecture et l’écriture, je suis déçu que tant d’élèves quittent le CM2 sans savoir lire correctement un texte et écrire dans un français correct. Cependant, une première approche de la programmation ne vient pas concurrencer cet apprentissage, mais l’accompagner. La programmation structure la pensée et l’aide ainsi à ordonner ses idées. De plus, écrire du code demande de l’organisation; il y a une grammaire à l’exemple de la langue française. La critique est encore plus vaine concernant les mathématiques, un certain nombre de tests en programmation demandant des connaissances dans ce domaine. La programmation peut même être une belle illustration des règles et des théorèmes de mathématique donnant une motivation supplémentaire dans ce domaine aux élèves.
Ensuite, le second type de critique porte sur l’évolution constante des langages de programmation rendant caduque les anciennes connaissances. En fait, il existe des formations adaptées pour les enfants qui permettent d’entrer en douceur dans ce vaste monde que constitue le développement informatique. Il ne s’agit pas ici d’acquérir une connaissance dans un langage spécifique, mais de former l’esprit aux grands concepts de la programmation. Ceux-ci restent pertinents dans le temps. Cela permet également de démystifier l’ordinateur. De trop nombreuses personnes, y compris des adultes de tous âges, abordent l’ordinateur comme un objet mystérieux, voire quasi-magique. De nos jours, il me semble qu’une connaissance minimale de cet outil fait partie de la culture générale au même titre qu’un bagage minimum en histoire, en géographie ou en science.
Enfin, les dernières critiques portent sur l’impossibilité pour de jeunes enfants de rentrer dans une logique qui serait seulement abordable à un âge plus avancé. Ceux qui émettent ce genre d’argument mésestiment les capacités des enfants à entrer dans des concepts simples de logique qui leur offrent la possibilité de structurer leur intelligence. Bien entendu, il sera temps, au collège et au lycée, d’entrer plus avant dans la programmation informatique.
Les enjeux
En terminant ces quelques lignes, je souhaiterai ajouter quelques remarques à même de faire mieux saisir les enjeux dans ce domaine.
En tout premier, beaucoup de nos contemporains ne prennent pas la place de la programmation informatique aujourd’hui. Celle-ci ne concerne pas seulement internet et tous les terminaux que nous utilisons : smartphone, tablette, ordinateur. Le langage informatique est partout présent. Si nous avons de l’eau ou de l’électricité dans nos maisons, nous le devons pour une part à des développeurs qui ont bâti des programmes pour gérer la distribution de ces biens de première nécessité. Il en va de même pour tout le système bancaire, la télévision, l’aviation ou les feux de circulation. Le développement informatique est partout présent.
Une seconde remarque utile porte sur l’usage des mots. Je préfère parler de programmation ou de développement plutôt que d’informatique. Un graphiste utilise, avec beaucoup de talent, un logiciel de retouche et de dessin. Il a une vrai compétence pour utiliser ce logiciel. Il utilise l’informatique, mais il ne fait pas de programmation. Celle-ci est indispensable à l’informatique, mais elle ne se confond pas avec cette dernière.
Une dernière remarque concerne directement les enfants qui pourraient découvrir les grands concepts de programmation et la manière dont fonctionne un ordinateur. Je remarque que beaucoup d’enfants limitent l’usage de l’informatique au jeu vidéo. La programmation est également un jeu, mais une activité ludique qui forme l’esprit et qui procure cette joie simple et riche du créateur connu de tous ceux qui ont bâti une œuvre, fruit de leur intelligence.
Si l’apprentissage à l’école ne peut s’exonérer de connaissance dans ces matières fondamentales que sont le français, les mathématiques, les sciences, l’histoire et la géographie; il serait dommageable de laisser la programmation de côté. Prendre cette attitude consiste à nier la réalité de notre monde et les enjeux actuels de notre société.
Mots-clefs : Benoit Hamon, code, école, informatique, primaire, programmation